Si l’âme n’existe pas, il s’ensuit qu’une morale qui s’appuierait sur son existence serait fondamentalement erronée. En effet, par exemple, prétendre qu’une action est bonne parce qu’elle est bénéfique pour notre âme ne fait aucun sens dès que l’on admet que l’âme n’existe pas. Or, les religions contiennent une morale qui s’appuie sur l’existence de l’âme. De fait, dans la plupart des religions, le bien est intrinsèquement justifié par des événements se produisant dans l’au-delà. En effet, dire qu’une action est bonne parce qu’elle émane de la volonté de Dieu implique clairement des événements se produisant dans l’au-delà. Or, puisque nous pouvons connaître ces événements seulement parce que notre âme survit à notre corps, on peut dire que les morales religieuses s’appuient sur l’existence de l’âme. Par conséquent, les morales religieuses sont erronées.
Comme je viens de le défendre (no.66), le bien est fonction de l’effet sur nos besoins. Par conséquent, les seules morales qui sont justifiables sont celles qui appuient leurs jugements sur une argumentation quant aux effets des actions humaines sur nos besoins. Effectivement, pour pouvoir prétendre qu’une action est bonne, il faut démontrer comment cette action permet de satisfaire des besoins. Il n’y a aucun autre type d’argument qui peut être acceptable pour justifier un énoncé moral. Cela demeure vrai même si les morales religieuses comportent effectivement beaucoup de préceptes qui seraient sans aucun doute identiques avec une morale exclusivement fondée sur la nature humaine. Par exemple, «aimez-vous les uns les autres» est une phrase qui implique sans aucun doute des bons effets sur nos besoins. Cependant, si on dit qu’il faut obéir à ce précepte parce que c’est la parole de Dieu (ou d’un autre être quelconque, humain ou non), cela ne peut pas être accepté. C’est une justification qui n’a aucun lien avec le fondement du bien et du mal. Comme je l’ai dit, une morale est acceptable seulement si elle se fonde sur la nature humaine.